Chapitre 8 - La non dualité tout en étant deux

Il y a donc ici une différence majeure entre les religions monothéistes et le bouddhisme, en ce sens où dans ces religions de la voie extérieure, un être supérieur, Dieu a créé toutes choses y compris l’être humain, alors qu’à l’inverse, dans le bouddhisme, c’est chacun de nous qui créons notre univers personnel.

D'ailleurs, cette théorie de la création, qui considère que même les choses que l'on croit exister en dehors de soi sont issues de notre propre esprit primordial, n'est pas le fruit d'un simple intérêt ou d'une spéculation philosophiques. En effet, en arrière-plan de sa création, il y avait un fort impératif religieux et éthique de ne pas s'attacher aux choses du monde extérieur. L’attachement est l’élément déclencheur de la souffrance. C’est pourquoi le bouddhisme enseigne « Soyez sans attachements ». En réalité, cependant, nous sommes sujets à d'innombrables obsessions. Je veux de l'argent, je veux avoir ma propre maison, je veux réussir, je veux la nouvelle Playstation, je veux le dernier IPhone, je veux ci, je veux ça..., désirs bercés par tout un chacun. Pourquoi, alors, de tels attachements et désirs surgissent-ils ? C'est parce que nous croyons que l'argent, la maison, être PDG ça existe et que si nous les obtenons ou le devenons, nous aurons une vie heureuse. En un mot, c'est précisément parce que nous sommes implicitement conscients que les choses du monde extérieur sont indéniablement réelles que nous nous attachons à elles.

Or, le bouddhisme enseigne que « le moi et les phénomènes du monde extérieur sont créés par notre propre esprit, en particulier la huitième conscience. Séparés de notre propre esprit, ces phénomènes n’ont pas de réalité ». On me dira alors, « pourtant, je vois les montagnes, je sens les fleurs, j’ai conscience d’exister » ! Certes, il y a des montagnes, il y a des fleurs et j’existe. Mais tout cela n’est que phénomènes au sein de l'activité mentale du moi. En fait, ce n’est pas que la montagne soit dans le monde extérieur et que l'esprit la voie, en réalité, l'esprit est dichotomisé en une partie qui a l'apparence de la montagne (l'esprit en tant qu'objectif) et une autre partie qui la voit (l'esprit en tant que subjectif), et le phénomène de voir la montagne se produit sur la base de l’opposition entre les deux. Pour le dire plus simplement, on ne voit pas la montagne parce qu’elle existe, mais elle existe parce qu’on la voit.

Ainsi, la conscience Alaya est le corps fondamental à partir duquel toute existence surgit. Par exemple, admettons que nous avons un crayon devant nous. Ce crayon, l'organe sensoriel appelé œil et la fonction de voir le crayon, ces trois éléments proviennent de la conscience Alaya. D'une manière plus générale, le monde naturel qui nous entoure (le monde réceptacle = kiseken-器世間), notre corps physique (le corps racine = Ukonjin-有根身) et les actions cognitives subjectives telles que les sensation, les perceptions et la pensée (les différentes consciences) sont toutes nées des modifications de cette Conscience Alaya, qui est le corps fondamental. Ainsi, la conscience Alaya stocke toutes les existences en tant que possibilité, ou en d'autres termes, en tant que "semences". C’est pourquoi, elle est donc également connue comme le "conscience de toutes les semences".

Le mot « Alaya » signifie « stocker », « entreposer », « accumuler ». Le nom « Himalaya », d’ailleurs signifie « accumulation de neige ». C’est pourquoi, on appelle également la huitième conscience « conscience entrepôt ».

La conscience Alaya est également le lieu où nous stockons l’influence de toutes nos expériences. Tout comme chaque paysage passant à travers l'objectif est gravé sur le papier photographique, chaque acte mental, verbal ou physique, bon ou mauvais, est instantanément planté dans la conscience Alaya comme une graine.

En sanskrit, le mot « acte » se dit « karma ». Ainsi, chacun de nos actes, qu’il soit mental, verbal ou physique est inscrit dans notre huitième conscience et, en même temps, cette graine crée la condition future de la rétribution de ces actes.

Ainsi, nous voyons que selon le bouddhisme, ce que nous sommes, comme tout ce qui peut nous arriver n’est pas l’œuvre d’un Dieu, du hasard ou de la destinée, mais bien la rétribution de nos propres actes.

L’enseignement donné par le Bouddha tout au long de sa vie n’avait pas pour objectif que nous comprenions ces choses, mais bel et bien que, par des pratiques appropriées, nous transformions le contenu de notre huitième conscience, le purifiions et, de fil en aiguille, purifiions notre septième conscience en remplaçant notre petit moi ridicule qui ne pense qu’à lui, par la vie immense du Bouddha et, pour finir, purifiions nos six racines, ce qui nous permet de réaliser la fusion parfaite du subjectif et de l’objectif et ainsi, de voir le véritable aspect des choses, ce qui s’appelle l’éveil, la bouddhéité.

 

 

Dans les prochains chapitres, nous verrons le contenu chronologique, méthodologique et doctrinal des cinquante années de prêche du Bouddha Shakyamuni, puis son développement à travers les âges au cours duquel, le grand maître du Tendai découvrit l’existence d’une neuvième conscience appelée Amara.

 

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