Sermon de Okô

Mars 2010

 

Traité sur le Honzon de l’observation du cœur

Tendai dit : "Voyant la fureur de la pluie, on comprend la taille du dragon. Voyant la luxuriance des fleurs, on comprend la profondeur de l’étang". Miaole dit : "Le sage connaît la genèse des choses et le serpent connaît la voie des serpents". Lorsque le ciel est dégagé, la terre est claire ; celui qui connaît le Lotus, obtient (la connaissance) des lois du monde.

 

Je remercie du fond du cœur les nombreux pratiquants venus assister à la cérémonie de Okô (la veillée de Okô) par laquelle nous exprimons ensemble notre gratitude envers la bienfaisance de notre fondateur Nichiren Daishônin.

Ce mois-ci, nous étudions une phrase située à la fin du « Traité sur le Honzon de l’observation du cœur » écrit par Nichiren Daishônin à Ichinosawa, dans l’île de Sado, le 25 avril 1273.

Lors de la dernière réunion d’étude, j’ai dis que l’échec du moine Ryôkan dans la prière pour la pluie avait été la cause de la persécution de Tatsunokuchi. Ryôkan et les moines de rang élevés des autres écoles, qui détestaient Nichiren Daishônin, avaient tous un lien avec les personnages principaux du gouvernement militaire. Aussi, ils utilisèrent leur influence pour projeter la mort de Nichiren Daishônin. En même temps, soucieux de ne pas se faire remarquer eux-mêmes, ils utilisèrent un moine appelé Gyôbin pour porter plainte contre Nichiren Daishônin auprès du Gouvernement militaire.

Ce procédé entraina la convocation de Nichiren Daishônin par les autorités le 10 septembre 1271. Il fut interrogé par Hei no Saemon no jô Yoritsuna qui le questionna sur la véracité du contenu de la plainte.

Bien entendu, Hei no Saemon n’avait aucune intention d’écouter les dires de Nichiren Daishônin, se contentant d’entrer en fureur à chacune de ses paroles. Afin de réclamer un examen de conscience à Hei no Saemon, Nichiren Daishônin lui écrivit le 12 septembre une lettre intitulée « Au sujet de (ce qui s’est passé) avant-hier ». La réponse de Hei no Saemon no jô Yoritsuna à cette lettre fut la cruauté. A la tête de plusieurs centaines de soldats en armure, il attaqua au milieu de la nuit l’ermitage de Nichiren Daishônin à Matsubagayatsu, piétinant les statues de Bouddha et les rouleaux des sutras.

Pendant ce temps, gardant tout son sang froid, Nichiren Daishônin récitait imperturbablement le Daimoku. Or, le moine Shôbô, qui accompagnait Hei no Saemon, no jô Yoritsuna s’empara du cinquième rouleau du « Sutra du Lotus » que Nichiren Daishônin portait dans sa poche et le frappa avec. Nichiren Daishônin, réprimandant Hei no Saemon no jô Yoritsuna et sa troupe, dit alors d’une voix puissante :

"Que c’est drôle ! Regardez Hei no Saemon devenir fou ! Messire, vous venez de faire tomber le pilier du Japon”.

(Les diverses actions)

Reprenant leurs esprits, Hei no Saemon no jô et ses hommes s’emparèrent alors de Nichiren Daishônin et l’emmenèrent au tribunal. Officiellement, on le condamna à l’exil à Sado, mais en réalité, les autorités avaient projeté de le décapiter à Tatsunokuchi. A la mi nuit, on l’emmena au lieu d’exécution de Tatsunokuchi. Nichiren Daishônin, qu’on avait fait assoir au lieu du supplice récitait Daimoku d’une voix sonore. Au moment où l’un des soldats allait abattre son sabre pour le décapiter, un objet lumineux apparut soudain dans le ciel. Finalement, les autorités ne purent parvenir à décapiter Nichiren Daishônin. Celui-ci fut placé pendant un certain temps en résidence dans la demeure de Honma Shigetsura et le 28 octobre, accompagné de Nikkô Shônin, il arriva à l’île de Sado et fut installé en son lieu d’exil de Tsukahara le 1er novembre.

Cette persécution de Tatsunokuchi est l’évènement revêtant la signification la plus importante au cours de la vie de Nichiren Daishônin. En effet, c’est par le biais de cette persécution qu’il manifesta l’abandon de l’éphémère pour révéler l’originel, abandonnant son aspect éphémère de l’homme ordinaire Nichiren, émanation du bodhisattva Jôgyô, pour révéler sa véritable nature de Bouddha originel au degré de dénomination du passé hors le temps.

Nichiren Daishônin écrivit divers Gosho comportant d’importantes doctrines pendant son exil à Sado. Parmi les importants écrits doctrinaux de cette période, on trouve le « Traité qui ouvre les yeux », écrit en février de l’année suivante, 1272, puis le « Traité sur le Honzon de l’observation du cœur, le 25 avril 1273 ». Le « Traité qui ouvre les yeux » fut adressé à Shijô Kingo et le « Traité sur le Honzon de l’observation du cœur » à Toki Jônin.

Concernant son enseignement et les doctrines développées postérieurement à l’abandon de l’éphémère pour révéler l’originel, Nichiren Daishônin écrit lui-même dans la « Lettre à Misawa » :

"En ce qui concerne la doctrine, considérez celle qui est antérieure à mon exil au pays de Sado comme les sutras du Bouddha, antérieurs (au Sutra du Lotus)".

Les doctrines antérieures sont donc différentes. On peut le constater également du fait que Nichiren Daishônin inscrivit des Gohonzon après avoir été exilé à Sado.

Forts de ce préambule, étudions à présent la phrase du « Traité sur le Honzon de l’observation du cœur ».

Le « Traité qui ouvre les yeux est considéré comme le "traité révélant le Honzon en tant que Personne". Il révèle en effet l’identité de la Personne et du Honzon. Par contre, le « Traité sur le Honzon de l’observation du cœur », lui, est considéré comme le "traité révélant le Honzon en tant que Dharma", démontrant l’identité du Dharma et du Honzon. Ce Gosho établit quel est le bon Honzon nous permettant de recevoir les grandes œuvres et vertus de devenir Bouddha et quel est le bon Dharma à pratiquer.

Dans « L’annexe du Traité sur le Honzon de l’observation du cœur », Nichiren Daishônin écrit :

"J’y ai commenté un peu la doctrine de l’observation du cœur. Je l’offre à Messire Ota et au vénérable moine Kyôshin. Il s’agit d’un sujet de la plus haute importance me concernant".

On comprend par là qu’il s’agit d’un des Gosho les plus importants, dans lequel une doctrine extrêmement profonde est contenue.

Je vais d’abord faire un résumé du Gosho entier.

Le début de ce texte concerne les phrases d’Une pensée trois mille indiquées dans le « Grand arrêt et examen » et constitue l’introduction à l’explication du Honzon pour l’observation du cœur. Il indique également qu’Une pensée trois mille concerne aussi bien les êtres sensitifs que les êtres non-sensitifs. Il enseigne également les deux portes de "la doctrine" et de "la contemplation". Il indique enfin que les statues de Bouddha, ne contenant pas la doctrine d’Une pensée trois mille ne peuvent pas être le Honzon de l’observation du cœur dans la période de la Fin du Dharma.

Ce Gosho expose également la doctrine de cinq niveaux de trois degrés. Ce principe répartit en cinq niveaux d’introduction, de développement et de diffusion. Partant du superficiel pour parvenir au profond, elle indique le Honzon que tous les êtres de la Fin du Dharma doivent vénérer. En outre, le traité indique que ce Honzon n’a pas été révélé dans les deux périodes de la Rectitude et de la Semblance, car il a été confié aux bodhisattvas jaillis de terre qui doivent apparaitre dans la fin du Dharma et le révéler.

Il dit en effet :

Alors, les jaillis de la terre de mille mondes apparaîtront, prenant pour assistant le vénéré Shakya de la doctrine originelle et établiront en ce pays le meilleur Honzon du Janbudvipa".

Enfin, il indique que le Bouddha du passé hors le temps fera son apparition et, avec les cinq caractères du Dharma merveilleux, substance d’Une pensée trois mille en sa réalité, sauvera tous les êtres.

Ce bref résumé ne peut naturellement pas épuiser le contenu insondable de ce Gosho. La doctrine d’"Une pensée trois mille" comme celle des "cinq niveaux de trois degrés", en particulier, sont des sujets relevant de l’enseignement de l’ensemencement au profond des phrases et sont des doctrines extrêmement profondes. Aussi, elles sont absolument inaccessibles sans, bien entendu, la "foi" dans le Gohonzon, mais aussi les directives des Souverains du Dharma successifs.

Nous allons à présent aborder le passage de ce mois.

Juste avant ce passage, nous lisons :

"Fort de cela, je pense aux grands séismes, aux grandes comètes et autres calamités inouïes dans les périodes de la Rectitude et de la Semblance. Elles ne peuvent être l’œuvre des Garudas, des Ashuras ou des dragons. Elles sont uniquement le présage de l’apparition des quatre grands bodhisattvas".

La lecture de cette partie, même si elle n’est pas mentionnée sur le calendrier, permet de mieux comprendre la phrase étudiée aujourd’hui. C’est pourquoi je souhaite la citer.

Elle fait suite à un autre passage disant, en substance : "Les bodhisattvas jaillis de terre apparaitrons dans la Fin du Dharma et établiront le meilleur Honzon dans ce pays. Si les bodhisattvas jaillis de terre ne se manifestent pas dans la Fin du Dharma, alors, le Bouddha ne sera qu’un grand menteur".

Nichiren Daishônin écrit ensuite : "Fort de cela, je pense aux grands séismes, aux grandes comètes et autres calamités inouïes dans les périodes de la Rectitude et de la Semblance". Il ajoute : " Elles ne peuvent être l’œuvre des Garudas, des Ashuras ou des dragons". Il explique alors la signification de ces catastrophes, disant : "Elles sont uniquement le présage de l’apparition des quatre grands bodhisattvas".

Les "Garudas", les "Ashuras" et les "Dragons" sont des créatures non-humaines présentes lors de l’assemblée du « Sutra du Lotus ». Ce sont des divinités bienfaisantes ayant pour fonction de protéger le pratiquant du « Sutra du Lotus ». Dans l’Inde antique, on pensait qu’elles provoquaient les tremblements de terre, les tempêtes et autres catastrophes. Toutefois, Nichiren Daishônin interprète les grands séismes de son époque non pas comme les catastrophes habituellement provoquées par les huit catégories d’êtres, mais comme le présage de l’arrivée des bodhisattvas jaillis de terre.

C’et alors qu’apparaît le passage étudié ce mois-ci.

Tendai dit : "Voyant la fureur de la pluie, on comprend la taille du dragon. Voyant la luxuriance des fleurs, on comprend la profondeur de l’étang".

Cette phrase est extraite des « Mots et phrases du Lotus ». On dit que le dragon gère la pluie. Toutefois, ici, j’interprète dragon par nuage. Autrement dit, on appelle dragon l’accumulation de nombreux nuages. Ainsi, lorsque qu’il y a de gros nuages de pluie, il pleut averse. Aussi, lorsqu’on voit la pluie tomber en abondance, on comprend la grosseur des nuages de pluie.

Ensuite, la phrase : "Voyant la luxuriance des fleurs, on comprend la profondeur de l’étang" possède la même signification. Si les fleurs de lotus et autres fleurs fleurissent à profusion dans un étang, on comprend alors que leurs racines sont profondément et solidement enracinées au fond de l’étang. Si l’étang est peu profond, il n’y aura pas beaucoup de fleurs et les pédoncules ne pousseront pas.

Aussi, Nichiren Daishônin montre, en citant Zhiyi, que le grand tremblement de terre de l’ère Shôka, les comètes de l’ère Bun’nei étant des événements sans précédents, leur signification étaient inconcevablement importante.

Le Grand Patriarche retiré Nikken Shônin, quant à lui, donnait l’orientation suivante :

"(Diverses formes de trois catastrophes et sept désastres se produisirent à l’époque de Nichiren Daishônin).Ce ne sont pas là de simples difficultés. Elles représentent l’aspect de la perte totale de l’enseignement du vénéré Shakya. En même temps, elles constituent le présage de l’apparition du grand enseignement apte à véritablement sauver tous les êtres pour l’éternité suivant l’extinction du Bouddha".

Ensuite :

Miaole dit : "Le sage connaît la genèse des choses et le serpent connaît la voie des serpents".

Ce passage est inspiré des « Notes sur les Mots et Phrases » du grand maître Miaole

Il y eut divers bienfaits grâce à l’apparition des bodhisattvas jaillis de terre. L’un d’eux est que ceux qui s’étaient attachés à l’enseignement du Bouddha ayant obtenu l’éveil pour la première fois, virent leur attachement ébranlé et naître le doute. La citation apparaît dans le passage des « Notes sur les Mots et phrases » expliquant ce principe.

La foule des auditeurs dont le bodhisattva Maitreya, voyant l’apparition des bodhisattvas jaillis de terre fut extrêmement étonnée. Le bodhisattva Maitreya demanda au vénéré Shakya qui étaient ces gens. La réponse à cette question est le chapitre « Durée de la vie ».

Maitreya était un bodhisattva de très haut rang. C’est pourquoi, tout en étant très étonné de l’apparition des bodhisattvas jaillis de terre, il connaissait en fait la signification de leur apparition et la teneur de leur sagesse. C’est ce qui signifie l’expression : " Le sage connaît la sagesse". Le "sage" désigne le bodhisattva Maitreya et la "sagesse" est la profonde sagesse des bodhisattvas jaillis de terre.

Le serpent connait ce qui concerne les serpents. Cet exemple possède la même signification.

Les paroles originales des « Notes sur les Mots et phrases » sont telles que je viens de le dire : "Le sage connaît la sagesse". Or, Nichiren Daishônin, lui, écrit : "Le sage connaît la genèse des choses". Nikken Shônin disait à ce sujet :

"Finalement, Nichiren Daishônin a cité cette expression pour exprimer le fait que seuls les bodhisattvas jaillis de terre connaissait chaque fondement du Dharma, que ce soit l’enseignement de la doctrine originelle de Shakyamuni, le profond Dharma de cette doctrine, ou leur propre profond état de vie. C’est pourquoi, on peut appliquer l’expression "le sage" aux bodhisattvas jaillis de terre. (…) En fait, la profonde sagesse de l’enseignement originel est indiquée par le mot "sage". Ce sage connaît la genèse de tous les Dharmas du Bouddha. Aussi, dans la période de la Fin du Dharma, alors que ce grand Dharma est sur le point d’apparaitre, les trois catastrophes et sept désastres se produisent tous en tant que signes avant-coureurs montrant l’extinction sans s’éteindre du Dharma originel. C’est dans ce sens que Nichiren Daishônin écrit ‘le sage connaît la genèse des choses et le serpent connaît la voie des serpents’".

Autrement dit, cette phrase sous-entend que Nichiren Daishônin est Bodhisattva jailli de terre et, en outre, puisque son état de vie est celui du Bouddha originel de la Fin du Dharma ayant abandonné son aspect éphémère pour révéler sa nature originelle, elle sous-entend qu’il est le Bouddha originel.

Voyons à présent la dernière phrase du passage.

Lorsque le ciel est dégagé, la terre est claire ; celui qui connaît le Lotus, obtient (la connaissance) des lois du monde.

Lorsqu’il fait beau temps, on distingue bien la forme des terres et des maisons. On peut également voir les lointains paysages. Par contre, les jours de pluie ou lorsque le ciel est nuageux, on ne distingue pas nettement le paysage. De même, lorsqu’on croit fermement à l’enseignement correct du « Sutra du Lotus », on voit de manière juste tous les phénomènes de ce monde.

Bien entendu, "celui qui connaît le Lotus" désignant les personnes gardant, croyant et pratiquant du fond du cœur le Dai Gohonzon du Kaidan de la doctrine originelle, on peut appliquer cette expression à nous-mêmes.

Il existe des expressions telles que "La loi du Bouddha est la loi mondaine" ou "la foi est la vie quotidienne". Dans le « Sutra du Lotus » lui-même, il est enseigné : "les maximes politiques, les règles de vie et les activités de subsistance de tous les domaines ne sont pas différents ni opposés au véritable aspect".

Pour savoir cela, il est important d’avoir de précieuses expériences de pratique par la pratique sérieuse de la récitation du Daimoku permettant de trouver une solution aux problèmes mondains quels qu’ils soient et de progresser. Grâce à ses expériences de pratique, on peut personnifier par soi-même l’expression "la loi du Bouddha est la loi mondaine". L’enseignement de Nichiren Daishônin n’est pas excellent seulement théoriquement. C’est la religion permettant de faire apparaître ses œuvres et vertus dans la réalité de nos vies quotidiennes.

Par ailleurs, l’un des bienfaits de la pratique du « Sutra du Lotus » est ce qu’on appelle la "purification des six racines". La purification de nos facultés personnelles de vue, d’ouïe, d’odorat, de goût, de toucher et de mental est expliquée par Nichiren Daishônin dans la « Transmission orale de la doctrine » par ces mots :"le bienfait est de devenir Bouddha dès ce corps, c’est la purification des six racines". Autrement dit, la purification des six racines est l’éveil dès ce corps.

Seul le Dharma de Nichiren Daishônin permet de manifester en nous ce grand bienfait.

Je termine ce sermon à l’occasion de la cérémonie de Okô en priant pour votre progression énergique, en souhaitant que vous graviez ce passage du « Traité sur le Honzon de l’observation du cœur » dans votre cœur et, tournés vers le 770e anniversaire de la naissance de Nikkô Shônin en 2015, ayez la grande conviction de "pouvoir infailliblement devenir Bouddha", quelles que soient les difficultés.

A la fin du mois, il y aura le Tozan de l’Aération des trésors sacrés. A mon retour, je célèbrerai Okô, mais, le lendemain, sur ordre du Département d’outremer, je serai en déplacement en Angleterre, Italie et Serbie pendant deux semaines. Je serai donc absent au cours de cette période. Je vous demande votre compréhension et votre collaboration.

Merci de votre visite.

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