Sermon de Okô

Février 2012

 

Traité sur l’obtention de la bouddhéité en cette vie

(Isshô jôbutsu shô - 一生成仏抄)

Si le cœur des hommes est souillé, leur terre l’est également. Si leur cœur est pur, leur terre sera aussi pure. Bien que l’on parle de terre pure et de terre souillée, il n’existe pas deux terres différentes. Tout dépend uniquement du bien et du mal de notre cœur. Lorsqu’on parle des êtres ou du Bouddha, il en est de même. Au moment de l’illusion, on parle d’êtres. Au moment de l’éveil, on parle alors de Bouddha.

Actuellement, le cœur égaré dans l'obscurité d'une pensée est comme un miroir non poli. Pour peu qu'on le polisse, il devient infailliblement le clair miroir de la véritable ainsité de la nature du dharma. Concevez une conviction profonde et polissez le miroir sans négligence, jour et nuit, du matin au crépuscule. Comment doit-on polir ? Seul réciter Nam Myôhôrengekyô est appelé « polir ».

Mesdames et Messieurs, je suis très heureux d’avoir pu, avec vous, venus malgré vos nombreuses occupations, exprimer notre gratitude envers la bienfaisance de notre fondateur Nichiren Daishônin.

Par ailleurs, j’ai également pratiqué le rite de Otanjô é, célébrant la naissance de Nichiren Daishônin.

Otanjô é est un rite célébré au temple principal et dans tous les temples de la Nichiren Shôshû. Au temple principal, il est dirigé par le Souverain du Dharma qui procède à la lecture du sutra dans le Mieidô (actuellement le Mieidô provisoire), puis au rite de l’ouverture des portes de la Pagode à cinq étages, à l’intérieur de laquelle il lit le sutra et récite le Daimoku.

On dit que cette pagode à cinq étages symbolise la source de la naissance et de l’apparition de toutes choses. En particulier, du fait qu’un Gohonzon y soit enchâssé, on peut la considérer comme centrée sur la spiritualité du Bouddha originel Nichiren Daishônin.

Nichiren Daishônin est né le 16 février de la première année de Jô-ô (1222) à Kominato, dans le pays d’Awa (aujourd’hui préfecture de Chiba). Son père était Nukina Shigetada et sa mère s’appelait Umegiku Nyo. Mais, ça, ce sont les apparences.

En réalité, ce jour fut celui de l’apparition du Bouddha originel de l’origine du passé hors le temps, le jour du jaillissement de la Tour aux trésors, autrement dit, du Gohonzon.

Au temple principal Taisekiji, tous les Gohonzon, y compris le Dai Gohonzon du Kaidan de la doctrine originelle enchâssé dans le Hôandô, comme ceux des temples de Tatchû, font face au sud. Autrement dit, ils sont enchâssés au nord.

Cependant, seul le Gohonzon enchâssé dans la Pagode à cinq étages est tourné vers l’ouest, autrement dit, il est enchâssé à l’est.

L’ouverture des portes de la pagode signifie l’apparition de Nichiren Daishônin et son orientation à l’ouest symbolise l’aspect de la vaste propagation progressive du Dharma dans le monde, passant d’abord par l’Inde, puis la Chine. A présent, ici en France, ou bien en Autriche, en Espagne, en Allemagne, en Italie et dans d’autres pays d’Europe, il y a des pratiquants s’efforçant quotidiennement dans la pratique personnelle et la conversion d’autrui. Tel est l’aspect de la propagation progressive du Dharma vers l’ouest.

A l’occasion de la cérémonie célébrant la naissance de notre fondateur, il est important de louer l’apparition du Bouddha originel et, par le biais de la récitation du Daimoku à titre de gratitude envers sa bienfaisance, promettre de déployer encore plus notre énergie dans la pratique personnelle et la conversion d’autrui dans la perspective de la vaste propagation.

Nous allons à présent étudier la phrase de ce mois.

Il s’agit d’un extrait du Traité sur l’obtention de la bouddhéité en cette vie.

Ce traité a été écrit par Nichiren Daishônin en la 7ème année de Kenchô (1255), soit deux années après la fondation de l’école, de sa chaumière de Matsubayatsu, près de Kamakura. Il avait alors 34 ans. Il s’agit d’une lettre adressée à Messire Toki Jônin, demeurant à Shimôsa (situé dans le nord-ouest de la préfecture de Chiba). C’est pourquoi, on l’appelle également Lettre à Toki.

Nichiren Daishônin qui, le 28 avril de la 5ème année de Kenchô (1253) établit son enseignement et fonda son école à Kasagamori sur le mont Kiyozumi situé dans le pays d’Awa, quitta sa région natale, pour Kamakura, lieu central de la politique à l’époque, pour sauver l’intégralité des êtres dans l’éternité de la Fin du Dharma. Puis, sans tarder, il construisit une chaumière à Matsubayatsu, dans la banlieue de Kamakura, qui devait être sa base de propagation du Sutra du Lotus. Par la suite, alors qu’il s’adonnait à la propagation, Messire Toki Gorô Tanetsugu, qu’on appela plus tard Jônin une fois qu’il fut entré dans les ordres, se convertit. La date de sa conversion est indéterminée, mais dans la mesure où le 9 décembre 1253 il reçut une Réponse à Messire Toki, on pense qu’il se convertit très peu de temps après la fondation de l’école.

Messire Toki s’efforça dans la foi, la pratique et l’étude et joua un rôle central au sein du groupe composé de Soya Kyôshin, Ota Jômyô et Shijô Kingo, qui se convertirent après lui. Il reçut plus de quarante Gosho, dont, en particulier, le Traité sur le Honzon de la contemplation du cœur, le Traité sur l’adoption de l’essentiel du Lotus, le Traité sur les quatre degrés de la foi et les cinq étapes de la pratique. La raison pour laquelle la protection et la conservation de Gosho destiné à la postérité lui furent confiées est que Messire Toki, gouverneur de Wakamiya, à Shimôsa (l’actuelle ville d’Ichikawa dans la préfecture de Chiba) possédait une assise solide dans la société régionale de l’époque.

Je vais d’abord parler du sujet global de ce Gosho.

Il constitue un encouragement à obtenir la bouddhéité au cours de cette vie par la récitation de tout notre cœur du Daimoku. Au début, il indique que la bouddhéité des hommes ordinaires s’obtient par la contemplation du principe merveilleux présent à l’origine dans les êtres. Celui-ci n’est autre que Myôhôrengekyô. Dès lors, réciter Myôhôrengekyô revient à contempler ce principe merveilleux présent à l’origine dans les êtres. En effet, Myôhô, le Dharma merveilleux, est ce qui explique et révèle que tous les mondes des dharmas sont inclus dans la vie d’une pensée.

Ensuite, il indique que, combien même nous gardons le Dharma merveilleux, percevoir celui-ci à l’extérieur de notre cœur serait une erreur. Ici, Nichiren Daishônin critique les enseignements circonstanciels antérieurs au Sutra du Lotus, selon lesquels il existe une séparation entre le Bouddha et les hommes ordinaires, entre la terre pure et la terre souillée, prêchant l’obtention de l’éveil après de longues et sévères ascèses accumulées au cours de nombreux parcours dans le cycle des vies et des morts, ou bien la recherche d’un autre monde appelé la terre pure, située ailleurs que le monde de l’endurance, où l’on va après la mort si l’on récite le Nenbutsu. Nichiren Daishônin enseigne alors que la substance de l’illusion comme celle de l’éveil sont une à l’origine. La purification de la Une pensée des êtres fait que l’homme ordinaire devient Bouddha dès ce corps, sans changer d’apparence, sur la terre de l’endurance sur laquelle il vit dans le présent. L’extrait lu aujourd’hui se situe dans cette partie.

Ensuite, Nichiren Daishônin enseigne que Myôhôrengekyô est la voie directe vers la bouddhéité. Enfin, il conclue ce traité en citant le Sutra du Lotus pour clarifier le fait que si, après l’extinction du Bouddha, dans la Fin du Dharma, on s’efforce dans la récitation du Daimoku en recevant et gardant le Dharma merveilleux dans le monde de l’endurance, on peut infailliblement devenir Bouddha au cours de cette vie.

Je vais à présent commenter l’extrait lu aujourd’hui.

En premier lieu, l’expression « obtention de la bouddhéité en cette vie » (isshô jôbutsu), située dans le titre, signifie que les hommes ordinaires peuvent devenir Bouddha au cours d’une vie, sans avoir à changer leur corps ordinaire. Cette expression est donc synonyme de « devenir Bouddha dès ce corps » (sokushin jôbutsu) ou de « devenir rapidement Bouddha » (sokushitsu tonjô).

Même les sutras antérieurs au Sutra du Lotus, enseignent ce qu’est devenir Bouddha. Toutefois, dans le Traité sur la pratique telle qu’elle est enseignée (nyosetsu shugyô shô), Nichiren Daishônin écrit :

Au sujet des sutras [prônant] les pratiques au cours de multiples éons, il dit "ils ne pourront finalement pas réaliser l’éveil sans supérieur".

Les sutras antérieurs au Sutra du Lotus, enseignent une bouddhéité obtenue en parcourant des voies détournées, telle des pratiques que l’on doit accumuler au cours de multiples éons, consistant en de sévères ascèses effectuées en répétant le cycle des vies et des morts pendant une période que l’on pourrait qualifier d’éternelle, pour enfin obtenir l’éveil. Ou bien encore, ils enseignent que par la pratique du Nenbutsu, on peut abandonner ce monde et, après la mort, renaitre dans la terre pure de la félicité extrême.

En d’autres termes, selon les enseignements des sutras antérieurs au Sutra du Lotus, le Bouddha est éloigné des hommes ordinaires et ces derniers ne peuvent pas du tout devenir Bouddha. De même, selon ces enseignements, la terre souillée et la terre pure sont deux choses différentes, de sorte que, ce monde de l’endurance, dans lequel nous vivons est un monde de désespoir où la souffrance ne cesse jamais.

C’est pourquoi, Nichiren Daishônin écrivait dans le Gosho cité à l’instant : « Au sujet des sutras [prônant] les pratiques au cours de multiples éons, il dit "ils ne pourront finalement pas réaliser l’éveil sans supérieur".

Dès lors, quelle est la bouddhéité prêchée dans le Sutra du Lotus ? A travers l’extrait lu aujourd’hui, Nichiren Daishônin nous montre qu’il est possible de « devenir Bouddha en une vie », autrement dit, d’obtenir avec notre corps tel qu’il est, l’état de vie de la bouddhéité dans cette vie.

Si le cœur des hommes est souillé, leur terre l’est également. Si leur cœur est pur, leur terre sera aussi pure. Bien que l’on parle de terre pure et de terre souillée, il n’existe pas deux terres différentes. Tout dépend uniquement du bien et du mal de notre cœur.

Au début, j’ai dit que « Nichiren Daishônin critiquait les enseignements circonstanciels antérieurs au Sutra du Lotus, selon lesquels il existe une séparation entre le Bouddha et les hommes ordinaires, entre la terre pure et la terre souillée ». Cette critique est formulée par ce passage.

Les phrases : Si le cœur des hommes est souillé, leur terre l’est également. Si leur cœur est pur, leur terre sera aussi pure exposent le principe de non dualité du support (le lieu où il vit) et le principal (l’homme) (eshô funi). En fonction du cœur des êtres que nous sommes, c’est-à-dire la rétribution du principal, notre territoire, autrement dit la rétribution du support change. C’est pourquoi :

Bien que l’on parle de terre pure et de terre souillée, il n’existe pas deux terres différentes. Tout dépend uniquement du bien et du mal de notre cœur.

Simultanément à la réfutation de l’idée selon laquelle la terre pure se trouve ailleurs, Nichiren Daishônin nous enseigne qu’en fonction de notre attitude spirituelle, nos bonnes ou mauvaises pensées, notre territoire peut aussi bien devenir la terre pure que la terre souillée.

Ensuite :

Lorsqu’on parle des êtres ou du Bouddha, il en est de même. Au moment de l’illusion, on parle d’êtres. Au moment de l’éveil, on parle alors de Bouddha.

Cette phrase signifie que l’on peut dire que « le Bouddha et l’homme ordinaire » sont pareils. Tout à l’heure, nous avons évoqué « le bien et le mal de notre cœur ». Ici, la différence entre « l’illusion » et « l’éveil » est la différence entre le Bouddha et l’homme ordinaire, leur origine étant la même.

Actuellement, le cœur égaré dans l'obscurité d'une pensée est comme un miroir non poli. Pour peu qu'on le polisse, il devient infailliblement le clair miroir de la véritable ainsité de la nature du dharma.

Nichiren Daishônin utilise ici un exemple pour étayer le passage précédent. Je pense l’avoir déjà dit auparavant, à force de les utiliser, les miroirs d’antan s’embuaient rapidement, au point de ne plus rien voir. A ce point, ils étaient inutilisables. Aussi, en les polissant, ils retrouvaient leur état d’origine.

Le cœur des hommes ordinaires également, si, en raison de diverses mauvaises passions, il est plongé dans l’illusion, il est alors semblable à un miroir laissé embué, sans le polir. C’est pourquoi, polir ce cœur le rend clair, comme l’est le miroir à l’origine. Cette phrase signifie donc que, derrière le cœur devenu invisible en raison des mauvaises passions, la nature du Bouddha va se manifester.

Le passage suivant enseigne comment, dès lors, il faut polir notre cœur.

Concevez une conviction profonde et polissez le miroir sans négligence, jour et nuit, du matin au crépuscule. Comment doit-on polir ? Seul réciter Nam Myôhôrengekyô est appelé « polir ».

Avoir foi du fond du cœur dans le Gohonzon, effectuer avec sérieux Gongyô le matin et le soir et accumuler la récitation du Daimoku permet de faire apparaître notre nature du Bouddha. C’est cette nature du Bouddha que Nichiren Daishônin appelle « le principe merveilleux présent à l’origine dans les êtres ». Réciter Nam Myôhôrengekyô revient à observer ce principe.

Dans le même Gosho, il y a une phrase qui ne fait pas partie de l’extrait lu aujourd’hui, qui est : « si vous pensez que le Dharma se trouve à l’extérieur de votre cœur, ce n’est pas du tout le Dharma merveilleux ».

Mésinterprétant cette phrase, certaines personnes déclarent de manière désinvolte que « le Dharma merveilleux, le Gohonzon sont présents dans notre cœur », ce qui revient à prétendre que le Gohonzon est inutile. Ce genre de pensées est une erreur absolue.

Au sujet de l’enseignement dispensé par Nichiren Daishônin tout au long de sa vie, il écrivait :

« Considérez ma doctrine avant mon exil au pays de Sado comme les sutras du Bouddha antérieurs [au Sutra du Lotus].

Comme il le dit lui-même dans cette Lettre à Misawa, il existe une différence de profondeur au sein de l’enseignement de Nichiren Daishônin, entre ce qu’il a prêché avant l’exil et après l’exil à sado. Ce Traité sur l’obtention de la bouddhéité au cours de cette vie a été écrit deux ans après la fondation de l’école, autrement dit, il fait partie de ses premières œuvres et n’expose pas encore l’esprit fondamental de Nichiren Daishônin.

C’est pourquoi, du point de vue du véritable aspect des dharmas et sur la base de la comparaison entre le provisoire et le véritable, Nichiren Daishônin indique la signification du Dharma merveilleux par le biais de l’expression « le principe merveilleux présent à l’origine dans les êtres » dont « notre cœur » est doté.

Toutefois, si l’on considère la substance principale de « notre cœur » du point de vue de l’intention originelle du Dharma de l’ensemencement de Nichiren Daishônin :

« L’âme de Nichiren n’est rien d’autre que Nam Myôhôrengekyô ».

Nous comprenons ainsi que l’expression « notre cœur » désigne en fait le « propre cœur » du Bouddha originel Nichiren Daishônin et, en particulier, qu’il demeure dans le Dai Gohonzon du Kaidan de la doctrine originelle, but de sa venue en ce monde.

Par ailleurs, à travers la transmission vitale à la personne unique, les Grands Patriarches successifs, ont hérité sans interruption de l’âme de Nichiren Daishônin. Aussi, si nous avons foi et nous conformons à la transmission vitale à la personne unique et récitons « Nam Myôhôrengekyô » au Dai Gohonzon, du fait de la non dualité du principe actif et du principe passif, autrement dit, lorsque notre cœur d’enseigné entre en fusion parfaite avec le cœur du Bouddha originel, qui est l’enseignant, alors, apparaissent le bienfait de devenir Bouddha dès ce corps. Réciter Daimoku en pensant posséder le Dharma merveilleux en son cœur tout en étant séparé du Dai Gohonzon et en niant la transmission vitale, ne provoque aucune œuvre et vertu.

Nous devons avoir la conviction que le bienfait de devenir Bouddha au cours de notre vie apparait immanquablement lorsque nous accumulons honnêtement la récitation permanente du Dharma merveilleux et la pratique permanente de shakubuku à autrui. Il est important que nous développions jour et nuit notre énergie en ce sens.

Une des manifestations de votre foi fondée sur la pratique personnelle et la conversion d’autrui est la réception du précepte (Gojukai) par huit personnes le mois dernier, qui sont ainsi devenue des camarades pratiquants de la Nichiren Shôshû. Ce mois-ci également, plusieurs personnes ont l’intention de recevoir le précepte. Cette année, nous devons ambitionner de réaliser à tout prix notre objectif, en étant unis, moine et pratiquants, en nous fondant sur la récitation de Daimoku.

C’est par ces mots que j’achève mon sermon de ce jour. Merci de votre visite au temple.

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