Sermon de Okô

Avril 2011

Remontrance à Hachiman

(Kangyô Hachiman shô - 諫暁八幡抄)

Pendant les vingt huit ans écoulés depuis le vingt-huitième jour du quatrième mois de la cinquième année de Kôchô, année du bœuf, signe d’eau cadette, jusqu’au douzième mois de cette troisième année de Kôan année du dragon, signe du métal ainé, je n’ai eu d’autre préoccupation qu’uniquement introduire les sept, cinq caractères de Myôhôrengekyô dans la bouche de tous les êtres du Japon. C’est l’acte de compassion de la mère tentant d’introduire le lait dans la bouche de son nourrisson.

Je vous remercie d’être venus si nombreux pour exprimer ensemble notre gratitude envers la bienfaisance de notre fondateur Nichiren Daishônin, par le biais de la cérémonie de Okô.

Une cérémonie d’offrande du bien aux victimes du grand séisme du 11 mars a eu lieu le 15 avril au temple principal Taisekiji sous la direction du souverain du Dharma Nichinyo Shônin.

Se conformant à cette cérémonie, le Shingyôji a effectué le rite dans le même esprit et, lors du Gongyô du matin de tout à l’heure, j’ai fais l’offrande du bien aux mânes des victimes. Je vous remercie d’avoir participé à la fumigation d’encens.

J’ai également prié pour la reconstruction rapide des régions dévastées et pour la réparation rapide de la centrale nucléaire accidentée.

Comme vous le savez, le monde entier, à commencer par le Japon, est plongé dans une situation de chaos. Toutefois, même cet aspect de chaos que présente le monde peut infailliblement être transformé en terre du Bouddha, par les œuvres et vertus du Dharma merveilleux. Pour cela, que devons-nous faire à présent ? Il va sans dire, l’essentiel est que chacun de nous prenne véritablement conscience que le moment est venu de s’efforcer dans la pratique personnelle et la conversion d’autrui, dans la perspective de réaliser la sérénité du pays par l’établissement de la rectitude, en parlant au plus grand nombre des œuvres et vertus du Dharma merveilleux.

Nous allons à présent étudier la phrase de Gosho de ce mois. Il s’agit d’un passage de la Réprimande à Hachiman. Ce Gosho a été écrit par Nichiren Daishônin en décembre de la 3ème année de Kôan (1280). Il était alors âgé de 59 ans et vivait au mont Minobu.

Le destinataire de ce Gosho est inconnu. Toutefois, dans la conclusion nous lisons :

Chacun de mes disciples doit faire des efforts !

On peut dès lors supposer, dès lors, que cette lettre est adressée à tous les disciples.

L’original est conservé au temple principal Taisekiji. Il s’agit d’une longue lettre que le souverain du Dharma, grand patriarche déroule chaque année lors de la cérémonie d’aération des trésors.

Avant de lire ce Gosho, il convient de prendre en considération la situation de l’époque.

Il existe une lettre adressée à Messire Shijô Kingo juste avant l’écriture de ce Gosho. On peut y lire :

La promesse formulée par le grand bodhisattva Hachiman lorsqu’il il enseignait le Sutra du Lotus en Inde fut faite en déclarant rejeter sincèrement les moyens. Au Japon, il fit le serment de venir résider sur la tête des personnes honnêtes. Néanmoins, le 14ème  jour du 11ème mois dernier, à l'heure du rat, il laissa brûler son sanctuaire et monta au ciel.

Comme ce passage l’indique, le 14ème jour du 11ème mois de la 3ème année de Kôan (1280), le sanctuaire dédié à Hachiman, situé à Kamakura fut détruit par un incendie. Commentant cet incident, Nichiren Daishônin écrit : "Eprouvant de la répulsion envers la terre de l’offense au Dharma, le grand bodhisattva Hachiman est parti vers le ciel".

Or, le grand bodhisattva Hachiman a formulé le vœu sur le mont sacré de protéger le pratiquant du bon Dharma. Aussi, s’il ne protège pas Nichiren Daishônin et ses disciples qui tentent de sauver le Japon à l’aide du Dharma merveilleux, il brise de lui-même sa promesse.

C’est pourquoi, ce Gosho est une sévère réprimande au grand bodhisattva Hachiman, à l’occasion du fait historique de l’incendie de son sanctuaire.

A cette époque, on s’attendait à une seconde attaque des Mongols et le peuple tremblait d’angoisse. Le shogounat lui-même jetait toutes ses forces dans les préparatifs défensifs. La société japonaise était donc en proie à une vive tension.

Comme d’habitude, je vais résumer le Gosho en entier.

Au début, Nichiren Daishônin indique longuement que la puissance des divinités célestes augmente ou diminue et que, grâce à l’apparition du Bouddha en ce monde, leur force augmenta. Nichiren Daishônin indique ensuite que les sutras prêchés par le Bouddha possèdent cinq saveurs. Il démontre à ce sujet que les savants et les moines érudits de l’époque ne savaient pas faire cette distinction. C’est pourquoi, les divinités célestes perdent leur puissance. En outre, non loin de réprimander l’offense au Dharma alors que tout le pays la commet, Hachiman y participe, tournant ainsi le dos de lui-même à la promesse qu’il fit devant le Bouddha de protéger le pratiquant du Dharma correct. Nichiren Daishônin le blâme pour cette faute qu’il réprimande en outre en citant la preuve par les phrases du sutra.

Nichiren Daishônin révèle ensuite la nature originelle du grand bodhisattva Hachiman. Grâce aux racines de bien des vies passées, il était né en tant que grand roi. A présent, sa bonne fortune s’est épuisée. De plus, du fait qu’il n’attaque pas les offenses au Dharma, il reçoit le blâme des cieux par le biais de l’incendie de son sanctuaire.

Nichiren Daishônin démontre ensuite les offenses aux Dharma commises par toutes les autres écoles, à commencer par les patriarches du mont Hiei, successeurs du grand maitre Dengyô. Alors que le grand bodhisattva Hachiman fit la promesse sur le mont sacré des aigles de "protéger le pratiquant du Sutra du Lotus", il ne protège pas le pratiquant du Sutra du Lotus qu’est Nichiren Daishônin et c’est pourquoi il reçoit la punition des cieux. Les fautes commises par le souverain du pays à l’époque du Bouddha Shakyamuni et la situation dramatique du pays à présent sont mises en parallèles. Ensuite, Nichiren Daishônin énumère les réalités concrètes des persécutions qu’il a lui-même subies et, en citant les phrases des sutras, réitère ses réprimande envers la lourde faute commise par le grand bodhisattva Hachiman qui manque de protéger le pratiquant du Sutra du Lotus.

Ensuite, Nichiren Daishônin montre à ses disciples la nécessité de réprimander Hachiman en citant l’histoire du Brahmane Nyagrodha. De plus, il indique qu’il propage le bon Dharma par compassion à l’égard des êtres du Japon. Malgré cela, Hachiman protège les offenseurs du Dharma, devenant ainsi l’ennemi du Dharma correct. Persécutant le pratiquant du bon Dharma, il s’attire la réprimande. Le passage de ce mois est compris dans cette partie.

Ensuite, pour ceux de ses disciples se méprenant sur son puissant shakubuku, Nichiren Daishônin explique la raison pour laquelle shakubuku est la pratique de la compassion et suggère de manière implicite qu’il est le Bouddha originel de la Fin du Dharma.

Nichiren Daishônin indique ensuite que s’il réprimande le grand bodhisattva Hachiman, ce n’est pas parce qu’il est un ennemi. Citant divers sutras, il enseigne que lorsque les vœux sincères ne sont pas réalisés, il faut alors réprimander les divinités protectrices. Il explique ensuite que s’il prêche le Sutra du Lotus et réfute les doctrines erronées, même au prix de subir de grave persécution, c’est pour sauver l’intégralité des êtres, montrant ainsi sa grande rigueur et compassion de Bouddha et que le grand bodhisattva Hachiman doit impérativement protéger le pratiquant du Sutra du Lotus.

Pour terminer, il montre, par le biais du principe de la diffusion du Dharma en direction de l’ouest, que le Dharma merveilleux des trois grands Dharmas ésotériques sera diffusé vers la Chine, puis vers l’Inde, annonçant ainsi la vaste propagation.

Je vais à présent commenter le passage du mois d’avril

Pendant les vingt huit ans écoulés depuis le vingt-huitième jour du quatrième mois de la cinquième année de Kôchô, année du bœuf, signe d’eau cadette, jusqu’au douzième mois de cette troisième année de Kôan année du dragon, signe du métal ainé, je n’ai eu d’autre préoccupation qu’uniquement introduire les sept, cinq caractères de Myôhôrengekyô dans la bouche de tous les êtres du Japon.

A l’âge de 12 ans, Nichiren Daishônin se rendit au temple Seichôji. Il devint moine à 16 ans, changeant de nom pour Zeshôbô Renchô. Par la suite, pendant quatorze ans, il voyagea dans toutes les régions pour y étudier. Enfin, au printemps de la 5ème année de Kenchô (1253), il retourna au temple Seichôji.

Ce qu’il obtint au cours de ce long voyage d’étude est, premièrement, la compréhension que toutes les écoles s’étaient détournées de la doctrine originelle du Bouddha Shakymuni, ce qui constituait la source de toutes les catastrophes. Deuxièmement, il comprit que l’enseignement devant être propagé dans la Fin du Dharma est les cinq caractères du Dharma merveilleux, cœur essentiel du Sutra du Lotus et que, lui-même, porteur de ce Dharma essentiel était la "renaissance du bodhisattva Pratique supérieure" venu pour sauter le monde souillé de l’ère finale.

Après de profondes réflexions, Renchô, qui était revenu au temple Seichôji, raffermit sa détermination à propager le grand Dharma de « Nam Myôhôrengekyô » sans régresser, quelque soient les grandes difficultés susceptibles de se produire.

Le Traité qui ouvre les yeux décrit l’état d’esprit de Nichiren Daishônin à ce moment.

Si j’en dis un seul mot, les persécutions du souverain ne manqueront pas de s’abattre sur mes parents, mes frères, mon maitre. Lorsque je pense que si je ne dis rien, je serai semblable à un homme sans compassion, en regardant à la fois le Sutra du lotus et le Sutra du Nirvana, je comprends que si je ne dis rien, même si rien ne se produit au cours de cette vie, je tomberai immanquablement dans l’enfer aux souffrances sans intermittence dans la vie suivante et que, si je parle, trois obstacles et quatre démons ne manqueront pas de m’attaquer.

Le 28ème jour du 3ème mois, avant l’aube, Renchô monta au sommet de la forêt de Kasagamori, sur le mont Seichô et, face au soleil en particulier et au monde des Dharmas en général, il dévoila pour la première fois « Nam Myôhôrengekyô, Nam Myôhôrengekyô », le Daimoku dont il avait obtenu l’attestation intérieure et, au temple Seichôji, il prêcha la doctrine de la chute en enfer du Nenbutsu.

Un mois plus tard, le 28ème jour du 4ème mois, il dévoila à tous les êtres le Daimoku, objet de sa propagation tout au long de sa vie. Saisissant cette occasion, Renchô changea son nom pour celui de Nichiren.

Au cours des vingt-huit années à partir de la fondation de l’école jusqu’à la 3èmr année de Kôan, date d’écriture de ce Gosho, Nichiren Daishônin consacra toute sa vie à uniquement rechercher la sérénité du pays en guidant tous les êtres vers le Dharma correct et par les œuvres et vertus inhérentes au fait de recevoir et de garder ce bon Dharma. C’est pourquoi, il écrit : « Pendant les vingt huit ans écoulés, je n’ai eu d’autre préoccupation ».

« Guider tous les êtres vers le Dharma correct », c’est prêcher l’enseignement du Sutra du Lotus et faire réciter Nam Myôhôrengekyô. C’est ce que veut dire Nichiren Daishônin par :

Je n’ai eu d’autre préoccupation qu’uniquement introduire les sept, cinq caractères de Myôhôrengekyô dans la bouche de tous les êtres du Japon.

Il agit de la sorte non pas pour sa propre gloire ou son seul profit. Comme il le dit lui-même :

C’est l’acte de compassion de la mère tentant d’introduire le lait dans la bouche de son nourrisson.

Comme le fait une mère en donnant le sein à son nourrisson, Nichiren Daishônin s’efforça dans son œuvre avec compassion.

L’année précédant l’écriture de ce Gosho, autrement dit le 12ème jour du 10ème mois de la 2ème année de Kôan, Nichiren Daishônin avait inscrit le Dai Gohonzon du Kaidan de la doctrine originelle, contenant les trois grands Dharmas ésotériques, but ultime de sa venue en ce monde. Ce Dai Gohonzon est la source du véritable bonheur pour tous les êtres de la Fin du Dharma. Il est le grand et bon remède laissé par le Bouddha originel.

Le fait d’absorber ce bon remède, autrement dit de recevoir et garder le Dai Gohonzon et réciter le Daimoku de la doctrine originelle, permet de soigner, de purifier la maladie des trois poisons contractée par notre corps et notre esprit. On peut, dès lors, transformer ces trois poisons en bonheur.

Finalement, shakubuku est la pratique de la compassion. L’acte de shakubuku est la manifestation du souhait de bonheur pour sa famille, ses amis, ses connaissances, c’est l’expression du sentiment de vouloir adoucir les souffrances auxquelles ils font face.

En raison de causes et de conditions profondes depuis le passé, nous avons rencontré l’enseignement du Bouddha, difficile à rencontrer. Grâce à la rigueur et la compassion du Bouddha originel Nichiren Daishônin, nous avons pu réciter le Dharma merveilleux. Nous devons avant toute chose manifester notre gratitude et rétribuer cette bienfaisance.

Ensuite, sans garder uniquement pour nous cette joie, nous devons enseigner le Dharma du Bouddha à ceux qui ne le connaissent pas encore.

Autrement dit, déployer son énergie dans la pratique de shakubuku constitue la pratique de la reconnaissance envers la bienfaisance de Nichiren Daishônin. Il convient, en outre d’avoir la conviction que cette pratique nous lie à l’extinction de nos fautes d’obstacles et à l’obtention de la bouddhéité.

Lorsque vous entendez le mot « shakubuku », il n’est pas nécessaire de vous mettre sur votre garde. Il suffit, comme le dit Nichiren Daishônin, d’enseigner à autrui avec le même sentiment qu’une mère donnant à boire son lait à son enfant.

Je termine mon sermon de ce jour en priant pour votre santé et votre énergie courageuse. Merci de votre visite au temple.

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